Que mesurons-nous ?

L’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés procède à une analyse minutieuse du système fiscal et financier de chaque juridiction afin d’identifier précisément les territoires les plus propices à la fraude à l’impôt sur les sociétés dans le monde et mettre en lumière les lois et politiques que les décideurs pourraient envisager de modifier afin que leurs juridictions favorisent dans une moindre mesure la fraude fiscale des sociétés.

À deux reprises au cours du processus de recherche, chaque juridiction classée à l’indice a la possibilité de commenter les résultats de l’indice et de les contester : au moment de la première ébauche des conclusions préliminaires et lorsque les résultats finaux sont calculés. Si une juridiction fournit des éléments de preuve suffisants pour contrer une évaluation établie par l’indice, l’évaluation est alors modifiée en tenant compte des éléments concernés.

Le processus de recherche implique de constituer une base de données d’évaluations fondées sur des données probantes. La base de données est le fruit de plus d’une année de recherche documentaire effectuée par une équipe dédiée et par de nombreux chercheurs du monde entier. L’édition 2021 de l’indice présente des données courant jusqu’au 30 septembre 2020 ; tout changement de la réglementation intervenant après cette date est donc exclu de l’évaluation de la juridiction pour l’édition 2021 de l’indice. La base de données est téléchargeable en intégralité ici.

La base de données contient des informations sur les structures juridiques, administratives, réglementaires et fiscales des différentes juridictions. Les principales sources de données sont des rapports officiels et publics de l’OCDE, du Forum mondial associé, du FMI et de l’UE. Parmi les données consultées figurent également des bases de données fiscales et des sites web spécialisés tels que le Bureau international de documentation fiscale (IBFD), les sites web des « Big Four » (les quatre plus grands groupes d’audit financier et de conseil au niveau mondial), et d’autres.

Vous trouverez ci-dessous un aperçu de la méthodologie de l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés. La méthodologie complète peut être téléchargée ici.

Classement des juridictions

Les juridictions sont classées selon leur valeur CTHI (valeur à l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés), qui mesure le degré selon lequel la juridiction facilite la fraude à l’impôt sur les sociétés des multinationales.

La valeur CTHI d’une juridiction est calculée en combinant le score de paradis fiscal et le poids de la juridiction à l’échelle mondiale. Le score de paradis fiscal d’une juridiction est une mesure de la marge d’abus à l’impôt sur les sociétés offerte par le système fiscal et financier de la juridiction, où un zéro signifie que la législation de la juridiction ne laisse aucune marge d’abus à l’impôt sur les sociétés et 100 correspond à une possibilité illimitée d’abus. Le poids d’une juridiction à l’échelle mondiale correspond à une mesure du volume mondial d’activité financière des multinationales accueilli par la juridiction concernée. En combinant le score de paradis fiscal d’une juridiction et son poids à l’échelle mondiale, on obtient un aperçu du volume mondial de l’activité financière des entreprises susceptible de fraude à l’impôt sur les sociétés au sein de la juridiction.

Un poids élevé ou faible à l’échelle mondiale n’est ni bon ni mauvais, mais plus le poids d’une juridiction est élevé, plus la juridiction se doit d’assurer une protection contre la fraude à l’impôt sur les sociétés – et à l’inverse, en manquant à cette responsabilité de protection, la juridiction favorise d’autant le risque de fraude à l’impôt sur les sociétés.

Ainsi, une valeur CTHI plus élevée ne signifie pas nécessairement que la législation relative à l’impôt sur les sociétés d’une juridiction est plus agressive, mais plutôt que la législation de la juridiction et sa position dans l’économie mondiale se combinent pour davantage favoriser le risque de fraude à l’impôt sur les sociétés par des multinationales.

Évaluation des scores de paradis fiscal des diverses juridictions

Le système fiscal et financier de chaque juridiction est évalué sur la base de 20 indicateurs de paradis fiscal, pour arriver à un score final de paradis fiscal déterminant la marge d’abus à l’impôt sur les sociétés offerte par le système en question. Un score de zéro signifie que la législation de la juridiction ne laisse aucune marge d’abus à l’impôt sur les sociétés et 100 correspond à une possibilité illimitée d’abus.

Les indicateurs de paradis fiscal couvrent un éventail de lois, de politiques et de pratiques telles que les taux d’imposition des sociétés de la juridiction, ses exigences en matière de déclaration pays par pays et ses limites de déduction sur le paiement des intérêts. Les indicateurs de paradis fiscal sont composés de plusieurs sous-indicateurs, ce qui signifie que le classement de chaque juridiction s’opère sur plus de 70 points de données. Pour chaque point de données, l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés fournit des éléments probants expliquant la notation de la juridiction. Des explications détaillées de chaque indicateur sont proposées ici.

Les indicateurs de paradis fiscal se divisent en 5 catégories : le taux minimal d’impôt sur les sociétés disponible, les niches fiscales et vides juridiques, les mesures anti-évasion fiscale et l’agressivité prévue dans les conventions relatives à la double imposition. Le score final de paradis fiscal d’une juridiction correspond à la moyenne des scores obtenus par la juridiction pour chaque catégorie.

Le score de paradis fiscal d’une juridiction n’est pas une simple fiche d’évaluation ; il permet d’identifier les lois et les niches fiscales auxquelles les décideurs peuvent remédier afin de contrer les abus à l’impôt sur les sociétés. La décomposition du score paradis fiscal de chaque juridiction peut être consultée dans le détail en accédant à notre page Profils des pays, puis en sélectionnant la juridiction concernée.

Mesure du poids à l’échelle mondiale

Le poids d’une juridiction à l’échelle mondiale correspond à une mesure du volume mondial d’activité financière des multinationales accueilli par la juridiction concernée. En d’autres termes, il s’agit d’une mesure du volume d’activité financière exercée dans le pays par les sociétés multinationales.

L’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés mesure le poids de chaque juridiction à l’échelle mondiale en s’appuyant sur les données relatives à l’investissement direct étranger (IDE) fournies par le Fonds monétaire international. L’investissement direct étranger est un investissement réalisé par une partie basée dans un pays donné, dans une entité juridique (telle qu’une société) qui est basée dans un autre pays. L’investissement se fait sous la forme d’une prise de participation majoritaire, ou d’actions, dans l’entité juridique concernée.

En 2019, le FMI a indiqué que plus de 40 pour cent des investissements directs étrangers dans le monde étaient des investissements « fantômes ». D’une valeur totale de 15 000 milliards de dollars, les investissements directs étrangers fantômes passent ainsi « à travers les coquilles vides des entreprises » sans « aucune activité commerciale réelle ». Les investissements directs étrangers fantômes ne jouent pas de rôle productif dans les économies qui les accueillent, mais transitent à travers le monde uniquement pour « minimiser la facture fiscale globale des multinationales ».

En prenant en compte le poids à l’échelle mondiale d’une juridiction lors de l’évaluation de son rôle pour ce qui est de permettre aux multinationales de payer moins d’impôts, l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés va au-delà des autres « listes noires » de paradis fiscaux puisqu’il évalue dans quelle mesure la juridiction favorise la fraude à l’impôt sur les sociétés non seulement sur le papier, mais dans la pratique. En un sens, le score de paradis fiscal d’une juridiction évalue dans quelle mesure son système fiscal et financier a été paramétré pour permettre aux multinationales de frauder. Et son poids à l’échelle mondiale évalue à quelle fréquence les multinationales se servent de son système fiscal et financier. La combinaison de ces deux mesures permet d’identifier les juridictions dont le système fiscal et financier compte parmi les outils les plus nocifs de la panoplie dont disposent les multinationales pour frauder à l’impôt.

Anguilla, par exemple, qui figurait sur la liste noire des paradis fiscaux de l’UE lors du lancement de l’édition 2021 de l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés, s’est vu attribuer un score de 100 sur l’Indice 2021. En d’autres termes, l’indice a établi que le système fiscal et financier de la juridiction offrait une possibilité illimitée d’abus à l’impôt sur les sociétés. Toutefois, Anguilla affichait un poids à l’échelle mondiale d’à peine 0,000017 pour cent, ce qui signifie que le territoire n’accueillait qu’une très faible part des investissements directs étrangers transitant aux quatre coins du globe. En combinant le score de paradis fiscal et le poids à l’échelle mondiale d’Anguilla, le pays apparaissait au 39e rang de l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés. Bien que le système fiscal et financier soit extrêmement nocif sur le papier, dans la pratique, la juridiction reste peu plébiscitée par les multinationales et n’est donc responsable que de 0,0058 pour cent des risques mondiaux de fraude à l’impôt sur les sociétés mesurés par l’indice.

En comparaison, les Pays-Bas qui, du fait de leur statut de membres de l’UE, sont automatiquement exclus de sa liste noire, ont pourtant obtenu un score de 80 à l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés 2021. Bien qu’étant très élevé, ce score demeure inférieur à celui d’Anguilla qui culminait à 100. Mais le poids à l’échelle mondiale des Pays-Bas était de 11 pour cent, ce qui signifie qu’ils ont accueilli 647 058 fois plus d’investissements directs étrangers qu’Anguilla. En combinant leur score de paradis fiscal et leur poids à l’échelle mondiale, les Pays-Bas se classaient au 4e rang de l’indice et étaient responsables de 5,5 pour cent des risques mondiaux de fraude à l’impôt sur les sociétés mesurés par l’indice. Bien qu’il puisse sembler moins nocif que celui d’Anguilla sur le papier, le système fiscal et financier des Pays-Bas est en pratique beaucoup plus utilisé par les multinationales à des fins de fraude à l’impôt sur les sociétés.

Pourquoi combiner le score de paradis fiscal et le poids à l’échelle mondiale ?

On combine le score de paradis fiscal et le poids à l’échelle mondiale afin de déterminer la valeur CTHI (valeur à l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés) d’une juridiction, sur laquelle se fonde l’indice afin de classer les juridictions.

Pour ce faire, la formule suivante est appliquée :

Pour définir comment combiner les scores de paradis fiscal avec les poids à l’échelle mondiale, nous nous conformons à l’objectif premier de l’Indice qui consiste à mesurer la contribution d’une juridiction au problème mondial des paradis fiscaux pour les sociétés, tout en mettant en évidence les réglementations nocives de ces territoires. Ce faisant, l’Indice des paradis fiscaux pour les sociétés contribue à la recherche et l’encourage en recueillant des données et en fournissant un cadre analytique permettant de montrer comment les juridictions facilitent les transferts de bénéfices ainsi que l’évasion et la fraude fiscales. Il concentre en outre les débats politiques entre les médias et les groupes d’intérêt public en encourageant et en supervisant les changements d’orientations politiques à l’échelle mondiale en vue d’une équité accrue en matière de fiscalité des entreprises.

Désaccords avec les données ou la notation

Selon nous, notre méthodologie a été appliquée de manière cohérente et transparente, en divulguant les données sous-jacentes pleinement référencées, après vérification croisée. Néanmoins, compte tenu de la complexité et de la sensibilité de la tâche, nous reconnaissons qu’il est possible que des différends surviennent.

Nous nous engageons à résoudre tout éventuel problème et accueillons favorablement tout dialogue. Si vous pensez que nos données, ou notre notation, contient/contiennent des erreurs, merci de nous contacter. Plus vos explications seront claires et détaillées, plus il sera aisé pour nous d’analyser la question et d’y apporter une réponse appropriée.

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